La ressource halieutique est de moins en moins présente dans l’océan. Les métiers des produits de la mer doivent relever le défi de la préservation de la ressource. Engagée dans cette démarche, la Criée de Quiberon investit dans un nouvel équipement lui permettant d’adopter la technique japonaise ikejime et de miser sur la valorisation des produits de la pêche. 

« Demain, nous devrons pêcher moins mais mieux », assure Jean-Marc Lizé, directeur de la Criée de Quiberon. Sa stratégie ? Compléter l’activité de la criée en direction des produits à forte valeur ajoutée. Le nouvel équipement dédié aux poissons vivants et à la méthode ikejime répond à cette volonté de valorisation de la ressource. Il a nécessité un investissement de 205 483,60 €, financé à 80 % par des aides publiques (comprenant du FEAMP, un cofinancement régional et un cofinancement lié au contrat de partenariat Région-Pays d’Auray) et 20 % d’autofinancement de la ville de Quiberon. L’organisation d’un espace de 300 m2 suit le principe de la marche en avant. Les dix bacs mobiles reçoivent les poissons vivants, une table assure leur abattage et la pièce réfrigérée permet de les conserver avant transport. « Cette méthode ancestrale japonaise préserve la qualité de la chair des poissons », précise Jean-Marc Lizé. 

Une technique ancestrale

A l’aide d’un outil doté d’un poinçon métallique, on procède à la décérébration du poisson. Il est tué sur le coup, puis saigné et placé dans un bain d’eau glacée afin de faciliter l’écoulement du sang. Vient le geste le plus technique consistant à détruire la moelle épinière au moyen d’un fil métallique « Ce qui évite aux toxines d’envahir le corps et à la chair d’entrer en putréfaction », précise le directeur. Mieux encore, le poisson peut être mis en maturation pour obtenir un résultat gustatif étonnant ! La technique ikejime est aujourd’hui privilégiée des chefs d’établissements gastronomiques et des chefs étoilés. Non seulement, elle contribue au respect de l’animal, en ne le faisant pas souffrir ou agonir, mais elle permet aussi de gagner en qualité et en durée de conservation par le biais de la maturation, jusqu’à 15 jours après abattage. Devenu un produit à forte valeur ajouté, le poisson ikejime coûte 25 % plus cher qu’un poisson pêché de manière traditionnelle. 

Atteindre 5 à 7 tonnes d’ici 2 ans

Cette technique s’applique aussi bien à la pêche de filet, de ligne ou de casier, le poisson devant rester vivant jusqu’à cet abattage. En 2018, la Criée de Quiberon avait déjà permis la vente de 7,4 tonnes de poissons vivants, en direction des poissonneries et des restaurants haut de gamme dans toute la France. Sole, turbot barbue, bar, dorade, maquereau, chinchard sont particulièrement concernés. « Avec la crise du Covid-19 et les confinements qui ont impacté les restaurants, notre activité a fortement chuté. Nous repartons désormais de zéro », observe Jean-Marc Lizé qui s’intéresse à un marché de niche et dont l’ambition est de remonter à 5 ou 7 tonnes durant les deux années qui viennent. « Avec cet équipement, nous avons la capacité de doubler la production », précise-t-il. Mais il faudra également recruter. A terme, deux personnes doivent intégrer la Criée pour pratiquer la technique ikejime. Aucune formation officielle n’existe pour le moment, alors que trois années de pratique intensive sont pourtant nécessaires pour la maîtrise du geste. Ainsi, la Criée de Quiberon participe à la création d’une filière ikejime en France, qui mettra à disposition son outil pour la formation des futurs opérateurs.